Droit de l'immobilier

Clause expresse requise pour le transfert de charges du bailleur au locataire

Dans un arrêt non publié au bulletin, rendu le 16 mai 2024 (pourvoi n° 22-19 830), la Cour de cassation a rappelé qu'avant la loi Pinel du 18 juin 2014, un bailleur ne pouvait transférer la charge d'une taxe légale à son locataire sans une clause explicite dans le bail.

Dans cette affaire, le bail commercial avait été signé le 18 décembre 2013 et était effectif à partir du 1er avril 2014, donc avant l'entrée en vigueur de la loi Pinel et de la réforme du droit des obligations de 2016. Le bail comportait une clause imposant au locataire de rembourser au bailleur toutes les charges, y compris les taxes, afin que le loyer soit net de toute dépense.

La Cour d'appel de Versailles avait jugé que cette clause obligeait le locataire à rembourser toutes les taxes, y compris celles d'enlèvement des ordures ménagères, et avait rejeté la demande du locataire de remboursement de ces taxes.

Cependant, la Cour de cassation a cassé cette décision en se basant sur l'article 1134 du code civil, affirmant que la taxe d'enlèvement des ordures ménagères ne peut être mise à la charge du locataire que par une clause claire et précise. Par conséquent, les baux commerciaux signés avant le 1er septembre 2014 devaient spécifiquement prévoir ce transfert de charge, faute de quoi le locataire n'était pas tenu de rembourser cette taxe.

Cette obligation est encore plus stricte aujourd'hui, car la loi Pinel exige que les baux conclus ou renouvelés à partir du 1er septembre 2014 contiennent un inventaire précis et limitatif des charges, impôts, taxes et redevances, avec leur répartition entre bailleur et locataire ( article L145-40-2 du code de commerce). Ce qui n'est pas explicitement mis à la charge du locataire incombe au bailleur, permettant au locataire de connaître clairement l'étendue de ses obligations lors de la signature du bail, évitant ainsi toute surprise.

 

Auteur : Julie Jacquot

Droit de l'immobilier

Le décret du 23 octobre 2023 fixe le périmètre du territoire de la communauté d’agglomération du Pays basque sur lequel est mis en place le dispositif d’encadrement préfectoral des loyers

La loi ELAN permet d’expérimenter l’encadrement des loyers dans certaines zones tendues jusqu'au 24 novembre 2026.

Le décret n° 2023-981 du 23 octobre 2023 a été publié, définissant les zones concernées dans la communauté d’agglomération du Pays Basque. Le dispositif d’encadrement des loyers sera mis en place dans les 24 communes suivantes : Ahetze, Anglet, Arbonne, Arcangues, Ascain, Bassussarry, Bayonne, Biarritz, Bidart, Biriatou, Boucau, Ciboure, Guéthary, Hendaye, Jatxou, Lahonce, Larressore, Mouguerre, Saint-Jean-de-Luz, Saint-Pierre-d’Irube, Urcuit, Urrugne, Ustaritz, et Villefranque.

Pour finaliser ce dispositif, un arrêté préfectoral fixera les loyers de référence.

 

Auteur : Nicolas MICHELOT

Droit de l'immobilier

L'action du copropriétaire face à des désordres qui touchent la résidence en copropriété

Un copropriétaire pourrait vouloir se substituer à un syndicat de copropriété défaillant pour obtenir la réparation de désordres ou malfaçons qui affectent le bâtiment du fait de travaux réalisés par des entreprises.

Cependant au visa des articles 14 et 15 de la loi du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis, la Cour de cassation, dans l'articulation de ces 2 articles, est venue préciser que le copropriétaire n'a pas qualité à agir en paiement du coût des travaux de remise en état.

Seul le syndicat des copropriétaires peut percevoir l'indemnisation relative au coût de la réalisation de ces travaux. Car seules les parties communes sont affectées.

Cour de Cassation 3e chambre civile 8 juin 2023 n° 21-15692.

Dans cet arrêt, Il s'agissait d'une action indemnitaire.

Cependant, le même copropriétaire peut agir pour faire cesser des troubles qui lui causent un préjudice propre (par exemple qui affectent ses parties privatives).

Il peut également, selon une jurisprudence constante, agir pour faire cesser des troubles qui affectent uniquement les parties communes telle que l'occupation de parties communes par d’autres copropriétaires (en ce sens Cour de Cassation 3e chambre civile 26 janvier 2017, n°15 – 24030).

En revanche le syndicat des copropriétaires peut agir seul, sans l'intervention des copropriétaires pour demander la réparation de dommages qui ont leur origine dans des parties communes et qui affectent les parties privatives d'un ou de plusieurs lots, même si les désordres ne portent pas atteinte à la totalité des lots de la copropriété (Cour de Cassation 3e chambre civile, 23 juin 2004, n° 03 – 10475)

Il reviendra alors au syndicat de copropriété de percevoir l'indemnisation et de la répartir par la suite en fonction des désordres subis (Cour de Cassation 3e chambre civile, 8 juin 2023, n° 21 – 22420)

 

Auteur : Nicolas MICHELOT

Droit de l'immobilier

Construction, empiètement et privation de vue et de lumière

Le contentieux entre voisins est nourri notamment lorsqu'une construction nouvelle vient obstruer la vue et priver de lumière.

Nous avons déjà fait un article sur ce sujet. article du 18 décembre 2023

La Cour de Cassation, dans un arrêt du 4 avril 2024 n° 22– 21132, traite à nouveau de la question mais avec des problématiques juridiques nouvelles.

Cette fois, le maître d'ouvrage du voisin n'avait pas pris soin de respecter le permis obtenu pour la construction de sa nouvelle maison, cette construction était en infraction avec le PLU et il avait construit à 70 cm au-dessus de la hauteur légale.

Pour autant, la sanction de destruction n'est pas encourue du fait du non-respect de cette règle d'urbanisme mais parce que le non-respect de cette règle d'urbanisme cause un préjudice direct et certain de vue et d'ensoleillement à son voisin.

Et la Cour de Cassation vient préciser, c'est l'apport de l'arrêt, qu’en matière délictuelle il n'y a pas à examiner la proportionnalité de la réparation. Le principe est la réparation intégrale… (et donc une destruction pour 70 cm). Le contrôle de proportionnalité s’examine dans les rapports contractuels. C'est une jurisprudence à suivre car même en matière contractuelle c'est toujours un préjudice qui est réparé…

 

Auteur : Nicolas Michelot

Droit de l'immobilier

Bail commercial et taxe foncière : impact sur le montant du loyer

(Commentaire de l'arrêt de la Cour de février Cassation chambre 3 du 8 2024 – pourvoi n°22-24268)

 Il est fréquent en matière de bail commercial que la taxe foncière soit mise à la charge du locataire alors qu'elle incombe légalement au bailleur.

C'est un avantage pour le bailleur.

Cependant, cela devient un avantage pour le locataire lorsqu'il s'agit de fixer le montant du loyer des baux renouvelés ou révisés : le loyer est alors fixé en fonction de la valeur locative. Celle-ci est calculée en prenant notamment en compte les obligations respectives des parties.

Dès lors, si le bail fait supporter au locataire des obligations incombant normalement au bailleur, sans contrepartie, cela contribue à diminuer la valeur locative du bien.

Ainsi, si le locataire doit supporter le paiement de la taxe foncière, la valeur locative du bien sera moindre, de même que son loyer.

Il en est de même si le bail prévoit des restrictions à la jouissance des lieux, ou si la loi impose au locataire des charges nouvelles depuis la dernière fixation du prix.

Auteur : Julie Jacquot