Nouvelle construction qui gâche la vue, me prive du soleil, porte atteinte à mon intimité : quel recours ?

Il a déjà été question dans un précédent article des nuisances et préjudices qui peuvent être causés à un propriétaire du fait de la construction voisine :

Nouvelles constructions et préjudices pour les voisins : quel type d'indemnisation peut-on demander ? 

Compte tenu de la crise du logement, les nouveaux projets de construction se font sur des parcelles de plus en plus petites et, en conséquence, proches des autres maisons déjà existantes.

Les tribunaux sont donc souvent confrontés à la question de savoir si la nouvelle construction permet aux propriétaires qui s'estiment lésés d'obtenir une indemnisation voir de bloquer la construction.

De la construction jurisprudentielle assise sur l'article 544 du Code civil, est né l'adage : 

« Nul de doit causer à autrui un trouble excédant les inconvénients anormaux du voisinage ».

En droit, il s'agit d'une responsabilité objective, c'est à dire que celui qui fait construire peut engager sa responsabilité quand bien même il n'a commis aucune faute où infraction à une quelconque norme.

La seule question qui va être centrale dans le débat juridique et que le Juge aura à trancher est de savoir si le trouble (c'est à dire ce que l'on reproche) est anormal.

Cette question de normalité est extrêmement subjective.

La Cour de cassation, par arrêt du 28 janvier 2021 numéro 19-24174  a estimé que la Cour d'Appel, en ordonnant la démolition du toit terrasse construit sur la parcelle voisine qui portait atteinte à l’inimité des habitants déjà en place, n'avait pas suffisamment précisé en quoi la vue plongeante de l'un vers l'autre était anormale.

Encore plus récemment, la troisième chambre civile, le 9 novembre 2023 numéro 22-15403, a pu préciser qu'en milieu urbain nul n'est assuré de conserver son environnement et que le propriétaire qui s'estime lésé doit prouver en quoi la vue dont il est privé présentait un caractère d'exception qui permet de qualifier l’anormalité de cette perte de vue.

Il y a donc, sous-jacent à cette notion de d'anormalité, une notion de gravité qui est à prouver.

 

Auteur : Nicolas Michelot
Cet article n'engage que son auteur.